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16 mai 2012

Les deux luths (surate de l’amitié)

Il y avait, plus loin, à se représenter des chagrins ordinaires. Comme des bergers passant dans les rocailles remarquent le reste d’un campement (leurs traces vieilles d’une année ou d’autres – d’ouvriers ? de brigands ?), reconnaissent aux épines, au tassement du sable, aux pierres noircies, les circonstances, les gestes, jusqu’à ce qui fut dit, le roi croyait entendre, marchant à pas de feutre sur le pavé des salles, ou voir dans le dessein des hauts tapis, après que chaque jour ils sont brossés, lançant vers lui sa face loyale, l’ami qui n’était plus : 

Ah tourne ton visage vers les ruines. N’est-il pas vrai que l’amoureux converse avec la seule poussière des heures vivantes,ou la trace d’un feu ? 

Voyant l’ami debout dans la couleur, discourant sous les voûtes (non vraiment sous les yeux : dans le profond du cœur), il savait que jadis, pendant qu’il chevauchait, ce compagnon au regard franc demeuré au palais l’accompagnait à des milliers de lieues, au Bengale, à Malwa, par la force du souffle, sans prononcer son nom. Quel besoin, en tout cas, d’une monnaie livrant son effigie ? Il suffisait d’entrer dans sa pensée, de dire : "N'avons-nous  vu ensemble, un jour, cette même sorte de bleu ?", ou " N’avons-nous ressenti pareille douleur du dos, après des jours de selle ?" pour que l’ami soit revenu.

Comme lui aujourd’hui, dans ce passé invérifié, il s’était souvenu qu’entre maître et disciple, entre ami et ami, il suffisait que fût touchée dans une salle la seule corde d’un luth, pour que, dans une autre lointaine, un second luth vînt à vibrer.

Et de même qu’autrefois, chevauchant, quand tout était clameur, que les serre-fioles se dépensaient, il répondait à son ami de derrière ses paupières, se confiant au silence de son cœur, à sa parfaite paix, – l’empereur, aujourd’hui,  levait son âme morte sans son linceul,  simplement, sans effort, la berçant seulement comme il aurait voulu le faire de sa tête tranchée, – glissant le long des larmes jusqu’à ce temps où les atomes étaient sans nom – n’étaient encore ni toi ni moi –, lorsque, l’argile n’ayant point cuit, lumière encore était le monde. 
Patrick Guyon
La Voix haute, pages 66-68
Cheyne Editeur, 1997.


14 mai 2012

Gay Films : La vidéothèque idéale

Des goûts et des couleurs... Le cinéma a produit de très beaux films sur le thème de l'homosexualité. Drames, comédies romantiques, il y en a pour tous les goûts. je ne sais pas vous, mais moi, il y en a qui m'ont vraiment remué. Je suis bon public, mais je dois avouer que j'ai souvent pleuré. Voilà, pour sucomber à la manie actuelle des listes, mes films favoris sans aucun ordre précis, juste au fil de mes souvenirs. Les premiers étant tout de même parmi mes favoris. Prochain post : les films courts.
Latter days

Maurice réalisé par James Ivory

Another country

Shelter

Les Chansons d'amour

Trick

A single man

Prayer for Bobby

Beautiful thing

Tan Lines

For a lost soldier

Juste une question d'amour

Judas kiss

J'ai tué ma mère

Jamais sans toi

Amnesia

A cause d'un garçon

Yossi and Jagger

Happy together

Presque rien

No regret

Dream boy

Hush!

Broken sky

My own private Idaho

La Conséquence

My beautiful Laundrette

Love! Valour! Compassion!

Get real

Mysterious skin

Brokeback Moutain

Little ashes

Lan Yu

Révérence

Combien significatif est ce mot en français. Révérence, tire sa révérence, faire une révérence, être plein de révérence.. Tu es mon révéré, mon révérend, mon insatiable rêveur, mon rêvé, mon tout, mon errance et quand tu pars, laissant derrière toi ce sillage parfumé de cuir et de lavande, ton parfum que je chéris comme une odeur de toi et le souvenir de nos étreintes, je me souviens et je soupire. Tu reviens le soir, effaré par le jour, des cernes sous les yeux qui rendent ton regard sombre et perdu. Tu approches la main de mon épaule, nos corps s'effleurent et se cherchent. Il est sept heures, allons dîner d'abord. Tu me raconteras. je te raconterai. Comme ces heures ont été difficiles. Nous étions tellement loin l'un de l'autre. La couche aux draps frais bientôt accueillera nos retrouvailles. Repu et anéanti de plaisir nous nous endormirons, l'un contre l'autre lové. Dans ton sommeil tu parleras, me disant des mots d'ailleurs, serrant très fort mes doigts entre les tiens.Le chien, ému par tant d'amour se couchera un peu plus loin. La nuit dehors passera bien vite dans cette ville où jamais rien vraiment de dort. Tu es mon âme, mon double, le sang de mes veines, la sève de mon désir à ton désir mêlée. Révérence rêvée, rêverie révérée. Tu es mon tout, mon unité, mon complément, ma vie tout simplement.

13 mai 2012

Oser montrer ce que l'on cache d'habitude...

Ce qu'il y a de plus intime chez un garçon, est-ce son sexe ou bien son coeur ? Un corps jeune et bien fait, ferme, fort, lisse et vigoureux est un plaisir pour les yeux et pour ceux à qui il se donne, l'amant fidèle ou le partenaire d'un soir, un plaisir pour les doigts et les lèvres... Pas de faux-semblants, le sexe dardé est aussi le symbole de la plénitude de notre amour, le plaisir partagé, l'incroyable bonheur qui précède et qui suit l'explosion de ce plaisir que les anciens ont célébré dans des oeuvres magistrales et qui nous rend l'égal des dieux.

"La photo est littéralement une émanation du référent. D'un corps réel, qui était là, sont parties des radiations qui viennent me toucher, moi qui suis ici; peu importe la durée de la transmission; la photo de l'être disparu vient me toucher comme les rayons différés d'une étoile. Une sorte de lien ombilical relie le corps de la chose photographiée à mon regard: la lumière, quoi qu'impalpable, est bien ici un milieu charnel, une peau que je partage avec celui ou celle qui a été photographié. Il paraît qu'en latin "photographie" se dirait: "imago lucis opera expressa"; c'est-à-dire : image révélée, "sortie", "montée", "exprimée" (comme le jus d'un citron) par l'action de la lumière. Et si la Photographie appartenait à un monde qui ait encore quelque sensibilité au mythe, on ne manquerait pas d'exulter devant la richesse du symbole: le corps aimé est immortalisé par la médiation d'un métal précieux, l'argent (monument et luxe); à quoi on ajouterait l'idée que ce métal, comme tous les métaux de l'Alchimie, est vivant". (Roland Barthes, La Chambre claire. Note sur la Photographie, in-Cahiers du Cinéma, 1980.)

Publicité ou Manifeste ?