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28 août 2022

Green Butterflies, une belle surprise cinématographique

 
 
Découvert sur Dekkoo un film émouvant venu de Colombie et sorti en 2017, Green Butterflies est un fim que je n’aurai certainement visionné spontanément. Il y en a tellement de ces histoires de coming of age, romans à l’eau de rose souvent niais que les producteurs avisés font mâtiner de scènes de plus en plus débridées à la limite parfois du pornographique. De ce point de vue, il est vrai qu’on passe un bon moment à suivre les découvertes de beaux jeunes adolescents bronzés et bien foutus. Mais une fois le film terminé, la plupart du temps on ne se souviens guère de rien. Avec ce film-là, on reste soufflé.Surtout par la performance incroyable de Deivi Duarte, l’acteur principal. Une manière d’accrocher la lumière, de gesticuler sans affectation, comme un danseur. Visage expressif et très doux, exprimant la pureté, la candeur mais aussi toute l’intransigeance des purs. Ce n’est pas une comédie mais un drame. La fin poignante est annoncée dès les premières images, laissant le spectateur se préparer aux dernières images. Les autres acteurs sont presque tous à leur place mais ans le rayonnement du héros. Je n’en dis pas plus pour ne rien spoiler de ce beau moment de cinéma.

 

Nous l’avons regardé l’autre soir sur la recommandation expresse de Mauricio le garçon brésilien que nous hébergeons depuis quelques jours le temps qu’il puisse s’installer dans une colocation près de son université. C’est un cinéphile aux goûts très éclectiques et aux connaissances encyclopédiques. Après le générique, nous étions tous silencieux. Émus en réalité par un scénario qui tient la route, une photographie très naturelle, agréable et une bande son qui porte sans trop peser.


Et puis, personne ne me contredira : Deivi Duarte est beau gosse. Âgé de 23 ans, il a un port d’aristocrate mais vient d’un milieu extrêmement simple de Colombie ou Venezuela, je ne sais plus. Ce n’est pas un nouveau venu dans la profession. Des critiques ont prédit au garçon une carrière à Hollywood. Moi je le vois plutôt ici, à New York, dans des films un peu cérébraux, adaptation d’œuvres littéraires par exemple. Je l’imagine jouant avec Chalamet, et d’autres représentants du cinéma indie new-yorkais. En Europe aussi chez les anglais ou en France... 

"La scène d’amour entre Kevin est moi est une très belle scène, zéro morbidité, et beaucoup de romantisme, ils n'était pas question de nous filmer à poils, nous portions nos boxers bien ajustés. Cependant, pour la deuxième prise, le réalisateur nous a voulu nus, Kevin s'est allongé et mon pénis en frôlant sa cuisse s’est naturellement durci. Là, il a fallu couper !",  ("pour éviter la censure et on a attendu que je débande." a certainement pensé Deivi Duarte sans pouvoir le dire devant les journalistes !). Endin, c'est ainsi que j'imagine les faits sur le plateau lors du tournage.

Ce commentaire très libre et dégagé de l’acteur m’a rappelé les paroles de Timothée Chalamet et Armie Hammer, son acolyte dans Call Me By Your Name... A Plusieurs reprises, ces deux-là ne laissèrent-ils pas entendre que bien des fois pendant le tournage, il y eut des moments de forte tension sexuelle entre les deux. Timothée et Armie (et les producteurs, pudibonderie yankee oblige), ont toujours laissé planer le doute quant à savoir s’ils avaient franchis une ligne dont il serait grossier de parler...

Here's the trailer pour vous faire une idée :

20 février 2022

The Most Beautiful Boy in the World

 
Reconnaissez-vous ce beau jeune homme, presque trentenaire ? Il s'agit de Bjorn Andrésen, le Tadzio de Mort à Venise, ce film-culte réalisé par Luchino Visconti en 1971 avec Silvana Mangano, Marisa Berenson et Dirk Bogarde, d'après le livre de Thomas Mann.
Un fascinant documentaire vient de sortir sur Bjorn Andresen, le suédois que Visconti découvrit à Stöckholm, à la recherche de celui qui allait incarner Tadzio dans son film Mort à Venise. Diffusé en ce moment sur le BBC, David et moi l'avons découvert hier soir. Un magnifique surprise.

Poignant, édifiant et magnifique, pendant 90 minutes on se promène dans la vie de l'acteur qui a vu alors qu'il ne souhaitait même pas participer au casting organisé pour le prince cinéaste, sa vie bouleversée. Le spectateur est avec lui tout le temps, des images connues ("Searching for Tadzio", 1970) mais longtemps oubliées de la rencontre entre le jeune éphèbe timide et le maître adulé, ces images presque répugnantes, où Visconti et son équipe font défiler des dizaines de garçons comme des maquignons au foirail passent en revue le bétail. Les commentaires du réalisateur : "il est très grand", "il est très beau", "qu'il se déshabille", qu'il soit filmé de très près", "dis-lui de sourire"... Et l'adolescent s'exécute, surmontant sa gêne et son ennui et quand il lui faut sourire, son sourire est une explosion solaire, tout son visage s'éclaire, ses yeux brillent. 

Peu à peu Bjorn, aujourd'hui largement sexagénaire, parle de ce maelström qui emporta son enfance, emposiuonne sa jeunesse sans jamais le soumettre, même quand de riches intellos amateurs de garçons le firent venir à Paris, l'installant dans un superbe appartement avec 500 francs par semaine d'argent de poche, sous le prétexte de le faire tourne rdans un film dont il serait la vedette et qui ne se fit jamais, quand le Japon l'accueillit comme les Beatles quelques années plus tôt, dans une hystérie qu'il ne juge pas mais qui l'ébranla. on découvre les chansons populaires qu'on lui fit enregistrer, les publicités dans lesquelles il apparaissait. Il semble avoir traversé tout cela sans faillir. les traits marqués pourtant portent les stigmates de bien des souffrances. 

Icône du monde homosexuel, inspiration originelle des mangas dans lequel on retrouve toujours son allure dégingandée, ses longs cheveux et son visage d'ange qui rendit folles les filles japonaises et tout autant les garçons. On a beau être éffaré par tout ce que le jeune homme, puis l'homme mûr aura vécu, on ressent tout de suite beaucoup d'empathie pour lui. Rien à voir avec l'abjecte évolution d'helmut Berger, lui aussi "démoli" par ce que Visconti fit de lui. Seul Alain Delon, naturellement roué, échappa à la loi commune des garçons ayant approché le grand génie du cinéma italien...

On le voit du temps de son mariage, on apprend que sa mère, poète, artiste, dilettante, égérie de Dior disparut fut retrouvée morte quelques années après, qu'il ne sait toujours pas qui était son père, que sa grand-mère le poussait à devenir quelqu'un, à répondre présent à toutes les sollicitations qui pourraient asseoir sa célébrité et faire sa fortune. 

 

Marié, père d'une petite fille, Robin, puis d'un petit garçon, elvin qui mourut à deux mois, de la mort subite des nourrissons, juste à côté de son père qui dormait. Sa longue dépression ensuite, s'accusant de n'avoir pas été assez présent pour son fils. Il lâche très ému qu'il ne s'en est jamais remis. Devant ce flot de confessions, cette vie racontée avec simplicité, sans aucune affectation, la caméra n'est jamais intrusive évitant au spectateur de se sentir voyeur. Le montage, dynamique sait faire la part, aux lenteurs nécessaires, aux silences et reste toujours dans la pudeur. Et c'est captivant parce que tellement vrai, tellement parlant. Et poignant, vraiment.

Poignant mais rempli d'optimisme aussi. on le voit aux prises à sa propriétaire qui lui reproche l'éétat de son appartement, les dangers qu'il fait courir aux voisins avec le gaz toujours allumé, la graisse qui s'étale autour de sa cuisinière. on le voit aussi ensuite avec sa compagne venue l'aider, toute remettre en état et faire briller ce qui quelques images plus tôt était sordide... On le suit lors de ses voyages, et à la fin sur le site du tournage, dans les salons abandonnés de l'Hôtel des Bains que Visconti redécora presqu'entièrement, sur la plage aussi et les dernières images sont poignantes. les gros plans sur son visage raviné, ses yeux plein de vie et d'énergie, mais aussi ce vague à l'âme que Visconti utilisa à la perfection, traduisant avec maestria, les humeurs et les sentiments ambigus de l'adolescence, tout ce qui fit vibrer le vieux professeur Ashenbach et lui brisa le coeur, au sens propre, sur cette même plage. Le regard égaré de Bjorn Andresen semble traduite à ce moment-là, plus que de la nostalgie ou du regret, l'aveu d'une ambiguïté profonde que ses sourires depuis le premier jour dévoilaient. Comme si une part de lui-même regrettait de n'avoir pas cédé à ces garçons, à ces messieurs et d'avoir peut-être manquer toute sa vie une forme d'amour qui l'eût vraiment comblé... 

Mais ce qui est réjouissant et fait l'émotion qu'on ressent à regarder ce documentaire, c'est cette impression plus forte que tout, d'une résurrection. L'acteur-icône s'est réconcilié avec son passé et tous les deuils qu'il n'avait pas fait, en les nommant, en remettant ses pas sur les lieux de ses souffrances (il le souligne lui-même avec des mots simples et vrais, quand défilent les images de la première à Londres en présence de la reine et de la princesse Anne, ou bien à Cannes lors de la conbférence de presse ou Visconti parle à sa place et parle de lui avec la morgue du génie qui se fit Pygmalion diabolique. Il fait sagement ce qu'on lui dit, suit ou devance Visconti, le visage contris, les traits crispés : "j'étais terrifié et affolé". On le voit à un moment du film, tandis que Viconti badine deban,t la presse, seul au milieu de tous ces adultes qui le badent comme les japonais au Louvre devant la Joconde...


L'innocent jeune apprenti acteur dont "Mort à Venise" changea à tout jamais la vie, artiste naturel, un peu poète, la tête ailleurs, mais foncièrement pur et dont la beauté demeure comme celle de ces dieux qui ne vieillissent jamais qu'en apparence. Sa voix adolescente était belle et sûre. Le tabac  - on le voit tout au long du film une cigarette à la main, choses rare en Suède où il est bien difficile de pouvoir fumer quelque part - en aura eu raison. Il joue parfaitement du piano (on écoute à un moment du film un de ses enregistrements où il interprète un morceau classique plus qu'honnêtement). Ci-dessous les chansons qu'il enregistra au Japon et un extrait du documentaire. 


et enfin le trailer :

16 avril 2021

Good Bye, Sir !

HRH Prince Philip Mounbatten, Duke of Edinburg,

 Prince du Royaume-Uni, de Grèce et de Danemark

1921 - 2021

 

29 mars 2021

Par un matin tranquille, Thomas...

 

 
 
Cette image retrouvée. Paris, rue de l'Isly, Nous nous étions rencontrés à sciences Po. Lui était en première année et je m'apprêtais à passer le diplôme. Le courant passa en un instant. Les jours passés ensemble à réviser firent le reste. Ses parents habitaient Paris. Je l'invitais à la propriété pour réviser pendant les vacances de Pâques. Il me rendit la politesse en me proposant de passer ensuite quelques jours chez ses parents qui voyageaient en Égypte. 
 
Une longue semaine studieuse et crapuleuse... Je me souviens... J'aimais tellement le regarder, l'entendre parler et suivre cette manière qu'il avait de se mouvoir dans l'espace, les gestes élégants, l'allure posée, virile. L'élégance même, naturellement héritée de sa famille patricienne. Tout me revient, la beauté de son dos si souvent caressé, le souvenir de sa peau douce et veloutée, son odeur, mélange irrésistible d'ambre, de violette et de vanille qui parfumait mon désir comme aujourd'hui encore il parfume ma mémoire. Ce n'était plus tout à fait un adolescent mais il en avait gardé la clarté irisée et laiteuse, jusque dans ses yeux qu'ornaient de longs cils dorés.
 
Il parlait beaucoup, me disait ses rêves et ses envies. Il y avait dans ses mots, la peur du monde adulte, avec ses contraintes et ses échecs. Il me disait qu'avec moi à ses côtés, il se sentait fort et que je l'inspirais... Il décuplait ma joie et cela rejaillissait sur notre relation. Elle fut joyeuse, douce, ardente et... secrète. J'étais le premier garçon... à la fois, frère, ami, amant, protecteur et compagnon de jeux. Avant lui, je n'avais jamais autant aimé...

Je me souviens de la dernière fois où nous fûmes ensemble et seuls. Son frère aîné devait arriver le lendemain matin avec sa fiancée, j'avais mon train en début d'après-midi. Pour notre dernière journée ensemble, nous avions décidé de rendre visite aux grecs et aux romains du Louvre. Cela avait duré toute la matinée. Après une étape-déjeuner sous les frondaisons du Palais-Royal nous avions longtemps marché dans les rues de Paris. 
 
La ville s'offrait au printemps tout neuf. Il faisait doux. Notre désir montait. Le reste de la journée se passa dans son lit. Assouvis, nous nous étions assoupis dans les bras l'un de l'autre. Soudain, il se redressa et tourné vers la fenêtre, il se figea. Il se leva et sa nudité auréolée par la lumière de la rue m'apparut dans toute sa splendeur de jeune dieu. 
 
- Mon jeune dieu, tu es mon jeune dieu !, me suis-je entendu dire. 
 
Il se retourna et en souriant me dit d'une voix si gentille :
 
- Non, c'est toi. Tu es le dieu, le mien. Je ne suis qu'un demi-dieu et plus rien sans toi !
 
Il avait entendu du bruit et s'inquiétait que ce fut son frère arrivant plus tôt que prévu. La romance en solitaire touchait à sa fin. Il nous restait si peu de temps dans la solitude délicieuse de la maison pour vivre sans contrainte notre amour... Mais tout est demeuré dans ma mémoire...
 
Nous avons dîné, bu du thé très fort, et la nuit fut lumineuse comme le fut notre réveil au matin... Notre dernier matin... Nous ne nous sommes plus jamais revus. J'ai appris quelques semaines plus tard qu'il avait été renversé par une voiture, non loin de chez lui. Il avait été transporté à l'hôpital dans un état grave. il mourut quelques heures plus tard. Nous devions partir en Grèce après les examens... 
 
A la radio, au moment où je termine ces lignes, la chanson "Here comes the sun" par George Harrison, si souvent écoute en prenant du thé dans la cuisine de la rue d'Isly ce printemps-là...

04 janvier 2021

Quand Alexandre ôta son masque


J'ai rarement des insomnies. Sauf à de rares exceptions, même au milieu de la ville qui ne dort jamais, je dors comme un bébé qui dort. Profondément. Mais ce soir-là, quelque chose trottait dans ma tête. Nous recevons souvent dans ma compagnie des stagiaires français. Souvent, ceux sont des étudiants en master de finances ou de droit commercial, parfois des élèves de Sciences Po Paris. Ils suivent un cursus à l'université et tous semblent avoir été reproduits par une imprimante 3D, leur apparence, leur mode de pensée, voire même leur langage. Non pas que leur anglais soit mauvais, ils possèdent bien la langue et ses nuances - si si, il y en a même chez les américains - et sont certainement très intelligents. mais tellement fades et formatés, coincés dans leurs certitudes. Avec mes associés, ils se confortent dans l'idée que le monde nous appartient, que la haute finance et l'argent sont les seuls communs dénominateurs entre Happy Few qui permettent de dominer et de réussir, donc d'être heureux. Les pauvres. 
 
Quand ils arrivent dans mon bureau, ils commencent à entrevoir quelques nuances. Je m'adresse à eux en français aussitôt après les avoir accueillis en anglais; les diplômes au mur les font instinctivement se mettre au garde-à-vous et j'avoue beaucoup m'amuser devant leur timidité. Je leur éthique et des concepts d'honnêteté et de solidarité et j'essaie de leur montrer que l'argent doit seulement être considéré comme un outil, un moyen et surtout pas la finalité, l'objectif premier. Ils repartent avec un dossier complet (en anglais) que mes collaborateurs renouvellent au fil de l'actualité. En six ans, seuls trois ou quatre stagiaires, des jeunes femmes pour la plupart, sont revenues dans mon bureau pour approfondir certains points. Bref, j'ai parfois l'impression que les jeux sont faits pour ces néophytes qui arpentent les trottoirs de Wall Street avec la certitude d'être sur les rails pour faire fortune, oubliant le nombre incalculable de génies de la finance qui sont venus s'écraser là, après avoir laissé un mot à leur famille et s'être élancés dans le vide. Depuis 1929, il y en a eu un paquet ! 
 
Mais ce qui me turlupinait ces derniers jours n'a rien à voir avec la morale et le monde des affaires que des escrocs dans le genre de Trump n'ont de cesse de polluer. La vraie raison a pour nom Alexandre. Venu comme les autres de Columbia, il est originaire de la même région de France que moi, et suit un cursus à  la School of International and Public Affairs. Il est passé par Yale puis après à la London school of Economics et terminait un stage à Sciences Po Paris. Une mère magistrat, un père lointain qui fut libraire ou éditeur à Paris, je n'ai pas vraiment retenu. Après les politesses d'usage, notre échange a pris une tournure étonnante. Il faut dire que le garçon détonait parmi les autres candidats stagiaires. Grand, brun, la peau hâlée, un visage glabre apparemment, éclairé par des yeux pétulants de malice, sans affectation. Un beau gosse assurément mais avec quelque chose de différent de ses congénères du même âge (il a 24 ans). Mais pour me faire une idée complète du personnage avec qui j'allais peut-être travailler chaque jour pendant plusieurs semaines, il fallait qu'il enlève son masque et la règle est de le porter continuellement dans les bureaux de la compagnie...
 
Je ne pensais plus qu'à ce masque qui me cachait la plus grande partie de son visage. Vous l'aurez sûrement remarqué vous aussi, depuis que le port du masque s'est imposé, on a l'impression que tout le monde est beau et si on focalise sur le regard désormais, notre imagination en focalisant suer ce que l'on ne voit pas et qu'on cherche à deviner, intensifie le désir et l'envie.
 
Alexandre parlait, de ses études, de sa vie, de ses aspirations. Il semblait à l'aise avec tout de même, une retenue qui cachait mal sa timidité. Il semblait vraiment vouloir ce stage et je voyais dans son regard combien il s'efforçait de répondre à mes attentes. J'écoute de nouveau ses propos, oubliant le masque et ce qu'il cache, la forme imaginée de ses lèvres, leur épaisseur, ses dents, son menton. Est-il glabre, barbu, les joues pleines et saillantes ou creuses ? Balafré ?

Tout ce qu'il dit, il l'exprime avec passion et véhémence. Un bon point. Il croit en ce qu'il dit. Et ses longs doigts dessinent les détails de sa pensée sur ses genoux ou sur le dossier posé devant lui. Je lui propose une boisson, il choisit un thé. Nous évoquons l'Angleterre et ses rites. Il rit. Je le trouve charmant sans chercher à charmer. Il a du charisme. Nous passons de l'anglais au français selon le sujet, l'idée que nous développons. l'entretien dura plus d'une heure. Ma collaboratrice vient nous interrompre. Une réunion m'attendait. Je lui propose de m'y accompagner. Il sourit, rougissant un peu et accepte. Ce n'est pas l'usage. Je n'ai pas encore décidé s'il rejoindra la bande des trainees qui vont collaborer avec notre équipe pour les prochains mois. Nous sommes huit associés et nous en choisissons chacun deux. Lorena est la première de ma liste. Elle est grecque et en formation à Cornell. Ils ne commenceront tous que le prochain lundi... Nous sommes mardi et j'ai demandé à Alexandre de me suivre dans la salle de conférence.En ouvrant la double porte matelassée, je m'imaginais Hadrien rencontrant à Rome le jeune Alexandre. Le télescopage des années et des civilisations me fit sourire. Je me raisonnais vite : je n'étais pas là pour créer un lien intime mais pour assumer mes responsabilités dans le cadre de mon travail et de mon entreprise...
 
J'invite le candidat à s'asseoir. La grande table qui sert pour les réunions ou les conférences nous sépare. Les dix sièges en cuir fauve sentent encore le neuf. je n'avais jamais remarqué cette odeur agréable, un  peu animale. Une employée vient d'amener un plateau avec une théière isotherme. Contrairement à mes collègues américains, je ne bois au bureau que du thé et j'en sers presque automatiquement aux gens que je reçois. Le jeune homme semble à l'aise mais sur ses gardes. Il est conscient que notre entretien va déterminer, sinon sa vie professionnelle mais les prochains mois. Je lui propose une tasse de thé. il accepte. Avec du lait et une cuillère de sucre. Bon point, c'est toujours ainsi que je le bois. Une habitude prise en Angleterre.
 
Je lui tends la tasse. en la prenant, il me sourit. En dépit du masque, je remarque son sourire. Naturel. Il plonge ses yeux dans les miens avec un léger battement des cils qu'il a très longs très bruns. Mon esprit s'égare un peu. j'ai détaillé rapidement quand il s'est retrouvé en face de moi son allure, ses vêtements aussi. la chemise en coton rayé est classique mais le col attaché lui donne un genre étudiant des meilleurs universités. la cravate le confirme. En soie, elle porte les couleurs de Yale. Sa veste en tweed, bien coupée avec une pochette en soie au motif cachemire. Très select aurait dit mon père. Alexandre doit avoir dix ou quinze ans de moins que moi, au grand maximum. Ce n'est finalement pas une grande différence. j'ai été dans sa situation à la fin de mes études. Mon goût pour les garçons et cette alchimie qui me fait sentir certaines particularités cachées, intérieures qui rapprochent naturellement, même en, l'absence de tout désir ou volonté, deux garçons et font surgir soudain un désir inattendu qu'on ne cherchait pas forcément. Je vis avec la même personne depuis des années et je suis heureux du couple que nous formons. S'il y eut au début quelques errements, des rencontres fortuites et beaucoup de tentations souvent assouvies mais jamais durables, il n'y a jamais rien eu qui puisse être l'indice d'un mal-être ou une envie d'aller ailleurs, Aucun besoin de remise en question de ma routine amoureuse. 


Mais là, ce matin, au siège de notre compagnie, par le hasard des appels à candidature, Hadrien se retrouve face à un nouvel Antinoüs. Il retrouve cet état de fulgurance physique, d'attraction pour un corps dont l'élégance et les mouvements titillent mes sens et éveillent ma curiosité. En lui tendant la tasse qu'il me prend en souriant, sans gêne, dans une pose prouvant sa parfaite éducation, cette aisance de prince altère mon souffle. Mon esprit l'imagine dépouillé de sa veste, de son chino beige aux plis bien marqués, de sa chemise et de sa cravate, presque nu devant moi avec son masque encore, comme seul accessoire vestimentaire. La charge émotionnelle devient presque intenable. Aura-t-il senti cette tension qui montait en moi ? En posant la tasse devant lui, il avait soudain baissé les yeux. Ce moment de silence aura permis à mes sens de se calmer. 
 
Je regarde son dossier. Lui me regarde. Quand je m'adresse à lui tout en remuant mon thé, après avoir baissé mon masque pour en boire une gorgée, Alexandre à son tour détache le sien. Contempler enfin son visage me pousse à sourire. Un sourire de contentement. J'ai devant moi un modèle de perfection. La peau, mate et lisse semble douce, unie, sans un défaut. Ses lèvres charnues sont d'un joli rouge et ses dents très belles, très blanches. Une bouche faite pour embrasser. Je pense soudain à Oscar Wilde, dont je viens de découvrir
la version non censurée de son "Portrait de Dorian Gray" publiée par Harvard University Press, qui disait des lèvres "rouges comme des pétales de roses" de son amant Bosie, (Lord Alfred Douglas) qu'elles étaient faites pour la folie des baisers ("the madness of kissing") ! Avec ça un menton volontaire, joliment dessiné sans aucune trace de barbe... Il a de petites oreilles et quand il parle, elles rougissent un peu. "Charmant" me dit Sandy ma collaboratrice en nous rejoignant. Cette intrusion, naturelle et prévue, m'agace pourtant en m'obligeant à sortir de ma contemplation. Elle aussi a remarqué cet être beau à la perfection. Je crois qu'elle agaça aussi Alexandre qui ne cessait de me regarder. L'entretien se déroula normalement. Le garçon répondit à toutes mes questions, s'exprimant avec aisance. Il ne semblait nullement intimidé ni gêné. Poli, sincère et très respectueux des convenances, il restait tout à fait à sa place mais je compris à son regard, à son sourire appuyé qu'il n'avait pas été insensible à l'hommage silencieux que je lui rendais. Les êtres de grande beauté sont souvent persuadés d'être imparfaits et ont peur de ne pas plaire. Il fallait clore l'entretien. j'avais d'autres rendez-vous à honorer. Pourtant, j'aurai aimer n'honorer que ce demi-dieu qu'un appel à candidature pour un poste d'assistant-stagiaire avait mis sur mon chemin. Il se leva, s'inclina joliment avec un sourire charmant et remit son masque. Dans ma tête, la voix d'Harry Wilson s'était mise à chanter Over the Rainbow et la salle était remplie des violons de l'orchestre qui l'accompagnait pour la bande son du film "You Got Mail"... Je crois même que j'entendais des oiseaux chanter...
 

En
d'autres temps, je lui aurai proposé de me rejoindre un peu plus tard pour boire un verre  au Veloce sur Amsterdam, un de mes bars à vin préférés mais les bars sont fermés jusqu'à nouvel ordre et je dois rentrer. Vais-je raconter à David mon trouble et mon désir. Nous nous disons toujours ce genre de choses et l'affection qui nous lie dépasse le doute et la peur de nous perdre. Je lui dirai que j'ai déshabillé ce bel Alexandre et que je l'ai imaginé nu et offert mais toujours avec son masque. Ses jolis yeux, ses cils, sa bouche, sa peau douce et lisse et son corps offert à mes caresses et à mon plaisir. Alexandre n'a pas intégré la compagnie. Son compagnon allait ouvrir son propre restaurant et il a choisi finalement de travailler avec lui. Nous irons un soir y dîner avec David, quand la vie reprendra comme avant. Je penserai longtemps à cette rencontre, à ces lèvres faites pour les baisers que cachait un masque de toile bleu marine...

21 novembre 2020

Connaissez-vous August Blanco Rosenstein ?


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Moi oui, comme tout New York et une bonne partie de l'Amérique depuis quelques mois. Talentueux jeune acteur (trois rôles dans trois films différents) remarqué dans Grand Army, la nouvelle tee-série de Netflix,où il a un second rôle qu'il rend indispensable. C'est aussi un musicien chevronné (il chante et compose). 

Ce garçon rayonne, sa voix, sa sa manière de se mouvoir dans l'espace, son sourire, ses yeux... Un monsieur tout le monde avec quelque chose dans le regard, les gestes qui saute aux yeux et qu'on n'oublie pas une fois qu'on l'a croisé. Un extrait de Grand Army, bientôt sûrement sur Netflix France ! J'ai bien aimé la série.

19 juillet 2020

Troye Sivan with Genius : ce type a du potentiel. really !

Enregistré à Melbourne, pendant le confinement, le jeune chanteur afrikaan, youtubeur et performeur explique la genèse de l'une de ses chansons, "Take Yourself Home", et comment le sens des strophes a changé avec la crise sanitaire.

A vingt cinq ans, ce jeune type a définitivement de la profondeur, de la culture, il réfléchit et oriente vers le meilleur d'eux-mêmes les adolescents qui sont fous de ce qu'il diffuse sur Youtube. Par sa musique, confiné en Australie alors qu'il vit avec son compagnon le mannequin Jacob Bixenman à L.A., il apporte une réflexion sur l'après crise d'une grande pertinence !

Non seulement, il est beau gosse, mais il est intelligent et cultivé. Est-ce son origine juive qui a donné sens à cette intuition artistique, qui oriente sa réflexion éthique et spirituelle ? Le fait d'avoir fui avec sa famille son pays natal, l'Afrique du Sud, triste pays abandonné à la violence et au chaos au quotidien ? En tout cas, il contribue vraiment à l'épanouissement des jeunes gays qui auraient encore quelques difficultés à s'assumer et à trouver bonheur et paix dans un monde bizarre où le concept d'homosexualité - inventé finalement il n'y a guère que cent ans - continue de déranger ou de perturber, un monde où on tue encore ceux dont l'orientation sexuelle dérange...


Et la chanson elle-même pour ce dimanche après-midi :


15 avril 2020

Peter Schlesinger, l'égérie, la muse et l'amant de D.H.


Tom Daley, his son and his mum in L.A.... a naked surprise



L'athlète a de l'humour, autant que du muscle. Le beau gosse est papa d'un petit Robert (le nom de son père, fan d'Elvis Presley), champion olympique célèbre, les américains l'aiment presque autant que les britanniques. Son accent certainement... Son mari n'est pas mal non plus... Une vidéo assez drôle réalisée par le plongeur qui rend visite à son portrait nu par David Hockney. 

23 septembre 2018

Le film Mario, ou quand deux joueurs de foot s'aiment d'amour...


Mario est un film suisse qui est présenté depuis quelques mois sur les écrans. Une découverte et une heureuse surprise. Non pas un énième film à la Brokeback Mountain. Juste une histoire douloureuse qui pourrait être racontée avec comme toile de fonds n'importe quel sport, ici en Amérique mais aussi partout ailleurs dans le monde. Combien d'athlètes gays, jeunes ou moins jeunes osent être ce qu'ils  sont devant leurs camarades, leurs entraîneurs, les sponsors et le public ? Il y a le discours flamboyant de générosité des intellos, des politiques, même des religieux - éclairés - sur l'égalité de tous, le droit de tous à une vivre librement son orientation sexuelle. Il y a les militants LGBT dont le combat est avant tout une lutte pour exister, un combat pour être reconnus comme l'enfant frêle cherche à provoquer l'attention du père solide. Nul autre combat à mener si ce n'est d'assurer que la dépénalisation de l'homosexualité doit être définitivement inscrite dans les tables de la loi universelle. Chacun doit pouvoir vivre et s'épanouir avec l'identité sexuelle (je n'aime pas l'expression, mais quoi de plus clair) qui est la sienne. Débattre s'il s'agit d'un choix ou d'une orientation innée, déterminée par pleins de facteurs génétiques, chimiques, mentaux, sociaux, est un débat inutile. Choisir de l'assumer et choisir d'être heureux de le faire est un sujet qui mérite qu'on s'y intéresse car de ce choix dépendra la vie entière de l'individu, son bonheur et son épanouissement. Les lecteurs d'Animula Vagula Blandula connaissent la position d'Hadrien !


Ainsi, le film suit Mario, un jeune footeux passionné - bien qu'on découvre au fil des images que cette passion a été lourdement induite par son père, joueur raté qui projette dans son rejeton mille rêves qu'il n'a pu vivre - et doué qui est remarqué par son club qui envisage de le faire passer chez les grands, en première division. Il a le football dans le sang tout en sachant le poids que son père fait peser sur lui. soudain tout bascule ou risque de basculer : Mario va tomber amoureux d'un autre joueur, aussi bon que lui, beau, solaire, épanoui, solide. Cataclysme chez le garçon. Quel choix sera le sien ? Le désir, la passion, l'affection, ou le sport et la réussite ?  la caméra très sensible, la finesse du jeu des acteurs, les deux héros bien sûr, mais aussi les seconds plans, les autres joueurs, les parents, les entraîneurs, les amis, une manière de suivre au plus près le protagoniste dans son dilemme, la liberté avec laquelle le cinéaste montre les corps qui s'aiment, sans aucune image triviale mais avec un respect plein de pudeur, et la description du milieu dans lequel tout cela se déroule, font que les deux heures du film passent sans qu'on s'ennuie une seconde...


Nous avons vu le film sur grand écran, Mark et son frère, deux amis de passage et moi . Tous nous étions soufflés par le jeu des deux acteurs, Max Hubacher (Mario) et Aaron Altaras (Leon), leur naturel et leur présence. Bob, acteur apprenti à Los Angeles, en est sorti des étoiles dans les yeux. "Ces allemands" nous a-t-il dit, "c'est l'Actor's Studio puissance 10 !" Voir s'entraîner, sur les campus mais aussi sur les terrains de sport partout autour de nous est quelque chose d'habituel. On prend tous plaisir (qu'on aime les garçons ou pas), à les voir évoluer sur le terrain , courir, feinter, marquer. Il y a quelque chose de très sensuel dans leur expression : avec leurs visages marqués par l'effort, leurs muscles tendus, leur tenue relâchée, leurs torses le plus souvent dénudés, il émane d'eux une impression de santé physique autant que mentale. et pourtant, combien parmi eux sont en proie au doute, à la peur, au désarroi parce qu'ils se réveillent la nuit en sueur, avec l'image d'un de leurs camarades aperçu la veille, au vestiaire ou sous les douches dans la splendeur de sa jeune virilité... 

Quand pour le National League, nous sommes des dizaines de milliers sur les gradins à acclamer nos joueurs préférés, et les autres, est-ce que nous réalisons que forcément parmi eux, ces vedettes indéboulonnables, il y a de jeunes homosexuels refoulés ou non, mais qui en tout cas sont toujours dans le placard... Comme les gamins qui jouent sur la pelouse du parc juste en face de moi, ces professionnels guère plus âgés, meilleurs parce que mieux et davantage entraînés, est-ce qu'ils représentent la société moderne, ici à New York, en France, en Suisse, en Angleterre, ailleurs encore ? Au moins sur une chose. L'éléphant dans un magasin de porcelaines, en terme de diversité, reste la sexualité. Ce film venu de Suisse qui traite de l'unassuming - pas trouvé en français le mot qui dirait aussi simplement les choses - et me fait écrire ces lignes, montre clairement, dramatiquement, sans jamais forcer le trait, pourquoi un jeune homme gay en plein décollage professionnel pourrait avoir à choisir de rester dans le placard. Dans les sports de ballon, en tout cas  dans les premières divisions et à ma connaissance, ce qui doit bien faire une centaine de clubs en occident, il n'y a aucun joueur ouvertement gay...Quand comme dans le film, les rumeurs, la jalousie et les intérêts financiers se mêlent de la vie privée de deux jeunes hommes que tout cela pourrait briser alors qu'il serait de notre devoir à tous, d'entourer leur amour de mille précautions, de discrétion et de respect parce qu'en dehors de l'amour etd e la bienveillance, nos vies ne servent absolument à rien. Et qu'on ne nous dise pas que là aussi il suffit de traverser la rue pour que tout change...


L'argent avant les Droits de l'Homme.


Deux heures de bon cinéma, poignant, émouvant mais jamais pleurnicheur ni bien pensant. Marcel Gisler a su tenir en haleine et rendre ses protagonistes (j'allais écrire ses joueurs) vivants et proches. Le thème aurait pu donner un énième film larmoyant sur les amours impossibles de deux jeunes demi-dieux dans un univers de gros méchants stupides pas beaux. C'est tout le contraire. On suit de jeunes gens confrontés au même dilemme et qui vont réagir différemment, mais avec les mots de tous, les sentiments les plus ordinaires, la souffrance la plus réelle. Rien d'esthétisé, de romanesque. La réalité d'une situation dure et tendue. Mais aussi un message clair et sain qui fait bien mieux que toutes les prises de position, les actions et les manifestations des associations LGBT !


Une énorme et inutile pression pour un tabou stupide.

Marcus Urban, un joueur allemand qui a révélé son homosexualité, très engagé sur les questions de diversité dans le sport de haut niveau, a parlé de la pression énorme qui pèse toujours sur les professionnels du milieu. Il a expliqué au réalisateur : "Outre le talent sportif, il leur faut disposer d’une constitution psychique très forte pour tenir le coup. Un joueur homosexuel doit non seulement supporter la même pression que les autres professionnels, mais aussi être dans un jeu de cache-cache permanent. Cela m’a donné l’idée de créer deux caractères différents qui souffrent du même conflit. Mario est le joueur au cuir épais, qui supporte mieux la pression. Léon est quant à lui moins apte à réprimer ses désirs, il est moins doué pour se mentir à lui-même.

Mario n'a pas d'alternative. Avouer son amour et son homosexualité et prendre le risque d'une carrière avortée. Est-ce que cela règlerait l'homophobie du milieu ? Rentre la tête dans les épaules et nier pour poursuivre sa carrière ?  Il sera toujours temps ensuite de révéler son identité sexuelle... Une saine réflexion que le spectateur va partager avec Mario et Leon aux réactions différentes... Sans rien spoiler, les amateurs de Happy Ending dans les dernières minutes du film pourront penser que tout est toujours possible et que ces deux-là, si beaux dans la découverte et la montée de leur amour, se retrouveront un jour... C'est en tout cas la conclusion à laquelle je suis parvenu en écoutant la bande son du générique de fin...

02 janvier 2018

Philip von Battenberg alias HRH Prince Philip, Duke of Edimbourgh


Celui qui fut un des plus beaux princes d'Europe aura 97 ans cette année ! Longue vie au mari de la reine Elisabeth. Petit-fils de roi, descendant de la reine Victoria, parent de toutes les familles impériales et royales d'Europe, ses mémoires intimes seraient une source incroyable d'information comme le seraient le journal intime de la reine. Un jour peut-être loin avant dans le XXIe siècle, bien après leur disparition, on pourra lire leur vie écrite de leur main et mieux comprendre ce que fut leur existence, leurs renoncements, leurs échecs et leurs joies.

 

10 mai 2015

Joe Dalessandro, beau et philosophe


Lu dans Gay Cultes, un blog ami où je  me reconnais souvent dans les idées, l'esthétique et le mode de penser (non il n'y a pas de faute, c'est bien de la manière de penser de l'auteur de ce blog dont je veux parler et non de ses pensées que je ne connais pas et qui ne regarde que lui), un billet sur l'icône de la Factory, premier homme objet, muse de Warhol et de Morrissey, celui dont l'entrejambe moulé fit en 1975 la couverture de la pochette d'un disque des Rolling Stones, pochette devenue aujourd'hui une pièce de musée, beau garçon libre et parfaitement à l'aise avec son corps dans un univers qui restait prude et hypocrite avec les questions sexuelles. 


A l'aise avec les jeunes comme avec les vieux, avec les hommes et avec les femmes, il a survécu à une époque démente, à des kilos de cocaïne et d'héroïne, passé à travers les années Sida, jamais oublié, toujours acteur, père et grand-père. celui pour qui Lou Reed composa la fameuse "Let's walk on the wild side". 


Celui qu'on a parfois pris pour une cruche juste bon à montrer son imposante musculature et à coucher dans un lit, est aujourd'hui un sage qui a toujours su garder la tête froide et a traversé toutes ces années (il a commencé alors qu'il n'avait pas vingt ans). 



Dans Little Joe, l'excellent film-documentaire produit par sa fille adoptive Vedra Mehagian Dallesandro et réalisé par Nicole Haeusser, qui a reçu un accueil enthousiaste au Festival de Berlin, Joe dalessandro exprime en quelques mots ce qu'il est vraiment et qui ne peut que rendre admiratif :
“I think it was because I didn’t have major hang-ups about my body when I was young, and I was so casual about nudity onscreen, that people got caught up looking at the surface. I know what it means to be judged on appearances. I’m a lot smarter than I appear to be. People would tell me I was beautiful, but I never knew what to do with that information. It didn’t register. I never really thought of myself as a good-looking man. I’m short, I’m stocky—I don’t know where good looks come in. I know beauty when I see it. All I can say is that I had a few good photographs taken where I look better than I do in real life. Beauty is fun. It has a place. But don’t mistake it for self-worth. If you have to be beautiful, do beautiful things for someone other than yourself.” 

On y apprend, outre cette attitude très intelligente face à la beauté et aux apparences, combien son cheminement a été riche, depuis ses années de délinquance juvénile jusqu'à sa découverte par Andy Warhol qui en fit une superstar mondiale, de super baiseur junky à grand-père gâteau vivant avec sa troisième épouse à Hollywood mais facilement accessible et toujours en activité à 65 ans. Un grand qui montre aux esprits rances que l'intelligence dépasse tous les préjugés.


A défaut de pouvoir diffuser Flesh qui marqua mon adolescence dans une mauvaise copie VHS, ci-dessous, le trailer du documentaire :