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14 octobre 2025

Nous avions douze ans quand nous sommes rencontrés

(work in progress.)
 
 
Je visitais l'été dernier un de mes anciens condisciples, installé depuis quelques années dans le Vermont. Bruno - que tous surnommaient Atti dans sa famille - et moi, nous nous étions connus à notre entrée en pension. Deux enfants un peu perdus, petits rois exilés. L'un venu d'Autriche, l'autre du Médoc, jetés soudain dans un monde de dortoirs froids et de prières du matin. Il m'avait souri. Et tout avait commencé là. Le même désarroi et la même inquiétude nous rapprochèrent. Nous avions trouvé l'un chez l'autre une forme de refuge silencieux. Réconfort et consolation.

Son père était peintre, un portraitiste autrichien de renom, issu d'une vieille famille de Styrie. Il peignait de magnifiques portraits dans son château presque en ruine près de Graz. L'idée de reprendre contact avec mon ami d'enfance m'était venue en découvrant la reproduction de plusieurs de ses œuvres dans un catalogue de ventes aux enchères. Parmi elles, intitulé "le fils du peintre". je reconnus avec émotion le portrait d'Atti enfant - celui-là même qui trônait jadis dans l'atelier. J'en ai déduit que son père n'était plus, et qu'avait suivi la dispersion habituelle des successions : partages, ventes, souvenirs éparpillés. Avec tout ce que cela signifie de dispersion, de liquidation, de déchirements...
 
Je me souviens du vieux schlöss, vaste et délabré, où régnait la grand-mère d'Atti, une vieille dame aux cheveux blonds et aux yeux bleus, qui n'était qu'indulgence et tendresse pour ses petits-enfants. Le père, déjà veuf, élevait seuls ses quatre enfants. Karl, l'aîné devenu magistrat, deux filles désormais heureuses mères de famille.Seul Atti, le plus jeune de la fratrie avait choisi d'aller voir ailleurs après le collège.   
 
Très proches pendant des années, au collège d'abord, unis dès le premier jour, puis pendant les vacances d'été que nos familles passaient à Bidart. Après des études en Angleterre, il quitta sa famille pour faire un tour du monde de plusieurs mois. Il m'écrivait de temps à autre. J'avais su qu'il s'était marié avec une fille rencontrée pendant ses études. Puis le silence. Pas une rupture, plutôt une lente dissipation. Comme la buée sur les vitres après l'aube. Mais le lien restait, invisible, immuable,, serein. Une année, il était venu me voir avec elle quand je vivais encore chez mes parents, dans le Médoc, avant de me proposer une virée en Espagne. Il n'avait pas changé, toujours aussi souriant et attentif aux autres. 
 
Nous avions été bien plus qu'amis de cœur à l'adolescence.Pas par jeu, ni par défi. Par évidence. Nous avions découvert ensemble le plaisir entre les draps et je crois que nous nous sommes vraiment aimés d'amour, avant de rien savoir sur ce sentiment. Les nuits blanches, la peau qui tremble, les corps encore neufs qui se cherchent pour se comprendre. C'était l'amour, avant les mots, avant les interdits.
 
On a longtemps continué de s'écrire, la plupart du temps de simples cartes postales, parfois de longues lettres enfiévrées, pleines de ratures et de feux. Souvent codées, remplies de dessins et de découpages., je les ai toutes gardées.
 
Puis nous avons grandi, muri. Nos vies ont pris des directions différentes, nos états d'âme ne vibraient plus au même diapason. L'éloignement fut naturel, sans que se  distendent nos liens d'amitié. C'est lui qui m'avait appris cette phrase-boutade de Proust qui m'a beaucoup marqué : «Je fais mieux l'amitié que l'amour». Dans mon souvenir, le plaisir partagé, donné et reçu, avec Atti, ce n'était pas mal du tout. 
 
Je pense que c'est pareil pour tout le monde. Je pense que rien jamais ne vaut le premier amour. Non pour ce qu'il promet, mais pour ce qu'il ignore. J'en ressens encore les effets en moi. L'intensité du plaisir, l'explosion de nos premières jouissances,  ces premiers éclatements de l'amour physique qui laissent un tellement fort souvenir vers 15 ou 16 ans, que tout ce que nous vivons de joyeux et harmonieux ensuite dans notre vie sexuelle d'homme, paraît toujours plus fade. 
 
Il y manque désormais cet effet de surprise, l'inattendu, l'incroyable découverte, la sensation nouvelle qui chez les êtres sains, indemnes de la pollution rance d'une morale étriquée et des peurs idiotes qu'assènent trop souvent des adultes libidineux que le plaisir et le sexe terrorisent. Quoi qu'en disent les esprits grincheux, tous ces culs de plombs  mal léchés C'est peut-être cela, la pureté. L'amour avant le langage. Deux garçons qui . Leur découverte de leur leur corps par le corps de l'autre, n'est en aucun cas malsaine, nulle  perversité ou trahison de la foi naturelle des enfants. C'est au contraire la révélation l'épanouissement de l'Amour que Dieu veut pour nous. 
 
 
Des années plus tard, quelques semaines avant mon installation à New York, j'étais parti avec mon frère et un de nos cousins dans les Pyrénées basques. Au programme de longues randonnées, de bons repas. La météo nous obligea à modérer notre enthousiasme. Il avait plu plusieurs jours d'affilée, rendant les sentiers impraticables et les balades sans intérêt. heureusement la maison où nous logions était confortable, une grande cheminée - nous étions en juillet - nous réchauffait et notre hôtesse cuisinait à merveille. 
 
Il y avait dans la chambre que j'occupais une étagère garnie de livres. J'y trouvais des trésors. J'y ai découvert un roman qui a marqué ma vie et orienté mes goûts littéraires et renforcé mes intuitions. "L'été des sept-dormants" de Jacques Mercanton a marqué ma vie, orienté mes goûts, confirmé mes intuitions. Je n'avais jamais entendu parler de cet auteur suisse pourtant célèbre. Je dévorais les deux volumes en quelques heures. 
 
Le héros me fit penser à Bruno. D'abord ils portaient le même prénom et vraisemblablement les mêmes origines sociales, autrichiens tous les deux. Bien des choses se sont ainsi faufilées pendant ces quelques jours en Haute Soule qui déterminèrent mon choix de quitter la France et de partir vivre aux États-Unis. 
 
Mon frère remarqua mon exaltation. Il me croyait amoureux. Nous n'avons jamais parlé de ce qui se tramait en moi. Je savais qu'il me fallait partir. Bruno m'avait montré le chemin. Pourtant il aura fallu des années pour qu'enfin nous puissions nous revoir. J'allais découvrir l'homme qu'il était devenu. A l'adolescence, notre amitié avait été de celles qui dépassent les mots, et nous mènent au-delà de nos attentes. Nous avons tout partagé : les secrets, les découvertes, les frissons. Depuis le premier jour, nous avons pu échapper à la peur et au doute. Cela se fit naturellement. Une proximité naturelle, immédiate. nous lia. Rien qui nous interpelle ou nous étonne. Il en était ainsi. Nous étions ensemble. "Parce que c'était lui, parce que c'était moi." Les années passèrent avec cette proximité qui n'étonna personne.Ni nos camarades, ni nos maître, encore moins nos parents. Nous étions les deux inséparables, oiseaux exotiques acceptés par tous. Parfois le bonheur des uns fait beaucoup d'ombre et trouble le cours des choses. Ce ne fut pas le cas pendant toutes ces années. notre amitié était acceptée, acquise, intégrée dans cette petite société féodale qu'était le collège. 
 

Personne jamais ne pressentit que notre relation s'amplifiait à la limite du tolérable pour cette société miniature. Les besoins et les pulsions de l'adolescence auraient pu mettre notre amitié en danger. Il n'en fut rien. Nous nous étions aimés, sans le savoir vraiment, d'un amour d'avant les définitions, les classements, les interdits. Nous étions un. Tous autour de nous s'étaient habitués à cette proximité de chaque instant. Puis la vie, naturellement, nous a conduit sur des chemins différents, L'amitié, elle, est restée, solide et tendre. C'est du moins ce que je ressens, comme une intuition. Il a simplement tourné une page mais je sais qu'il a continué - comme moi - de chérir ceux que nous étions alors et n'a jamais renié ce que nous avons vécu. J'allais en avoir le cœur net.

( à suivre )

 

17 mars 2025

Militaires et gays, 15 films à voir en streaming en 2025

 
Belle initiative que ce catalogue des 15 films à voir dont le thème est l'amour gay dans l'armée. Plusieurs des films cités sont devenus de grands classiques, certains plus anciens un peu oubliés, méritent d'être revus ou découverts.
 
Comme ce merveilleux film des années 90, sur l'amour intense de deux adolescents, l'un tout jeune soldat canadien bloqué à la fin de la guerre, quelque part en Hollande et un écolier à peine plus jeune dont il va changer le destin. Il y a aussi ce merveilleux film israélien, Jossi et Jagger (qui a eu une suite) et cet autre israélien, l'histoire d'amour, de passion et de deuil entre un jeune palestinien et un juif à Tel Aviv...

23 février 2025

Le dimanche, les garçons s'ennuient

Il y a des garçons qui jamais ne trouvent le temps long. L'esprit toujours attisé par leur appétit de vivre et la gourmandise de leur imagination. Ils sortent, font du sport, chassent l'amour et poursuivent leurs rêves. D'autres, à l'imagination tout aussi fertile et aux rêves plein de couleurs, ne sont pas sortis. Le monde certes ils ne le fuient. Pas encore. Il leur reste tellement de choses à découvrir, tellement de gens à rencontrer. Mais le dimanche, quand la maisonnée s'est vidée, que la famille est partie en promenade ou chez les grands-parents, ils ont préféré rester, prétextant des devoirs à terminer, un mal au ventre ou un début de rhume. La mère était désolée, le père n'a pas insisté. 
 
Appelons-le Sam. Il est assez jeune encore pour se souvenir de sa propre adolescence. Les petits étaient ravis de se débarrasser du grand frère taciturne, la sœur heureuse aussi de ne plus sentir pour quelques heures le regard acerbe et critique de son aîné. Elle est la seule aussi qui sait ce qui occupe son esprit. Il ne sera pas seul dans la maison vide. Il sera avec l'image, l'odeur, la voix, les gestes de celui qu'il aime et dont il attend un signe pour se sentir totalement, absolument heureux.

Alors, Sam désoeuvré regarde par la fenêtre, sans rien voir. Son regard passe au-dessus des arbres et des futaies qui limitent le jardin, au-delà des maisons de l'autre côté de la petite rue vide. Quelques oiseaux qui chantent la douceur du jour ne réveillent même pas les chats qui dorment au pied du lit. Il s'est recouché après avoir pris une douche. Longtemps il a laissé l'au froide, puis chaude, puis froide à nouveau couler sur son corps. Il sentait son désir monter alors il s'est séché et, nu, il est revenu dans sa chambre. Nu il est resté, étendu sur son lit, dans le silence de la maison. Il s'est assoupi. Une moto est passée qui l'a réveillé. Une envie de pancakes et de porridge soudain l'a poussé à se relever. Par réflexe, il a enfilé un caleçon et il est descendu dans la cuisine, suivi par un des chats, le plus jeune qui ne le quitte pas lorsqu'il est dans la maison. La mère continue sa sieste, roulée en boule sur la couette épaisse, ne bougeant même pas une oreille.

Les pancakes avalés, avec un grand jus de fruit et un bol de porridge, il s'est installé dans le salon. Couché sur le canapé, il a allumé l'ampli de son père et mis un CD. Il aime la musique. Il apprend le violoncelle. C'est sa neuvième année. Il a commencé très jeune. Cet instrument le fascinait. Son oncle a joue dans un ensemble de musique de chambre. Le terme l'a toujours fait sourire, de la musique de chambre, comme on dit un pot de chambre, une femme de chambre. Petit, ça le faisait rire tout seul. Sam aime la voix de l'instrument, si proche de la voix humaine. Son père est musicien. il enseigne au collège et dirige l'orchestre d'étudiants. Sa mère est pianiste. Tous les enfants jouent d'un instrument. L'un d'entre eux peut-être en fera son métier. Ils sont jeunes, ils ont le temps d'y penser. Le temps de choisir. Il regarde dans le jardin. Les feuilles mortes qui flottent sur l'eau de la piscine. Un merle perché sur la rambarde de l'escalier chant.e à tue-tête. Le printemps n'est pas loin. Les grues sont passées quelques jours auparavant D'ailleurs, il fait moins froid la nuit. 

Il a pris son livre. C'est Eric qui le lui a recommandé. Il l'a trouvé dans la bibliothèque de la maison. "The City and the pillar" de Gore Vidal. Il est à son père. Sa mère lui a dit que c'est une histoire très prenante. il était un peu gêné par le thème. Une histoire qui met en scène des garçons. L'histoire d'un garçon qui sait qu'il aime les garçons tout en assumant sa virilité. En cherchant sur internet qui était l'auteur, il s'est rendu compte de l'importance du bouquin à l'époque de sa parution. Il s'est dit qu'ils avaient de la chance de vivre dans le New Jersey, proche de New York où les mentalités sont bien plus ouvertes que dans le Sud des années 40 ou 50. Et puis, la photo qu'il a trouvé de l'auteur jeune lui a fait penser à Eric... 

Eric et Sam, une longue histoire. Ils se connaissent comme les deux héros du livre depuis leur enfance. Ils ont appris à nager ensemble et leurs deux familles se fréquentent beaucoup. Leurs parents sont amis depuis l'université. Fred, le père d'Eric est le parrain de Lucie, sa sœur aînée. Il les aime bien. Il lit quelques pages. Le chat réclame des caresses. Il s'est lové contre sa cuisse et ronronne en reprenant sa sieste. Si le chien était resté il aurait jappé pour monter sur le canapé, choses formellement interdite, mais la présence du chat contre son jeune maître le rend fou de jalousie. Il prend alors un air triste et renfrogné qui amuse la famille. Le garçon cède toujours quand les parents ont le dos tourné bien sûr... Un dimanche ordinaire. Il s'est un peu assoupi. Quand il se réveille, la pièce est plongée dans l'obscurité. Il n'y a aucun bruit dehors. Le ciel s'est assombri. Il va sûrement pleuvoir. Le chat s'étire comme un gymnaste avant l'entraînement. 
 
Sam pense à Eric. Il aimerait qu'il soit là, près de lui. Il baille et s'étire. Un mince filet de bave coule sur son menton. Il s'ennuie avec délice. Avec Eric s'il était là, ils auraient joué à lutter. Leurs deux corps tendus se mêlant avec force. Débraillés, collés l'un à l'autre, sentir la chaleur humide de leur corps mêlés l'excitait particulièrement. Tous deux cherchaient fougueusement ce contact des peaux transpirantes. Très vite ils devenaient de jeunes bêtes sauvages. I Un jour, la limite entendue, jamais clairement décidée, a été dépassée. Ils étaient rouges, échevelés, haletant, riant et grognant ensemble. Soudain ils sentirent que leur corps s'échappaient. Il ne se maîtrisaient plus totalement. Rester maître de soi. Se calmer avant que n'explose sous la toile du pantalon ce plaisir recherché mais qui terrorisait. Sam s'en souvient clairement. Y penser une fois encore le fait trembler. 
 
 
Ils avaient très chaud, leurs chemises étaient trempées. Eric tout  rouge était couché contre Sam, sa poitrine écrasant son torse nu. Il avait un souffle court. Dans un gémissement roque, Eric, sa chemise largement ouverte se frottait de tout son poids contre Sam qui gémissait et tentait de reprendre le dessus. D'un coup il se redressa. son sexe bandait. Pris de panique, il se recula d'un coup, repoussa son ami et se releva. Sam immobile, reprenait son souffle. Il se dressa sur les coudes. Eric lui jeta un regard affolé. Ramassant en vitesse sa chemise et ses chaussures, il quitta la pièce et partit de la maison. Sans un mot. Ils ne revirent pas pendant quelques jours. Ce fut la dernière fois qu'ils pratiquèrent ce jeu. Quelques jours avant, luttant tout pareil, C'est Eric qui avait senti l'érection de son ami. Il s'était exclamé, dans un fou-rire innocent, en fixant la bosse qui tendait le short de Sam :  "hey, You've got a boner". Sam avait baissé la tête et regardé son short gonflé "Yep" avait-il répliqué naturellement, comme si rien de plus naturel ne pouvait exister. "Do you mind ?" Eric avait répondu avec un grand sourire "No, it's cool"... 
 

Revenu à la réalité d'un dimanche solitaire, à la grisaille d'un après-midi sans soleil, il soupira. Il aurait bien aimé que ça se passe comme ça avec Eric. Comme dans ce film qu'ils avaient regardé ensemble. Eric ricanait, gêné, mais n'en perdait pas une. Le film terminé, ils s'étaient regardé longtemps en silence... Classique. Sam sentait bien qu'Eric l'attirait physiquement. Il passait du temps avec Gillian, sa petite amie, il la désirait mais on ne fait pas ce qu'on veut dans une famille de chrétiens évangéliques. On évite les pensées impures et les gestes irrémédiables. Avec Eric, il y avait quelque chose de plus que le désir animal qui lui titillait l'entre-jambes et le réveillait parfois la nuit. Ses rêves commençaient toujours par les jolis petits seins ronds de Gillian, sa bouche gourmande de baisers mais très vite, le corps d'Eric s'interposait et peu à peu l'image de Gillian s’estompait. Il se réveillait alors en sueur, juste avant de polluer son lit. Il ne faut pas, il ne faut pas ... 
(To be continued...)



13 février 2025

Images favorites

 
 
Le temps passe tellement vite et j'ai souvent l'impression de passer à côté de plein de choses et d'en délaisser, de perdre des heures précieuses à travailler, à voir des gens que je n'ai pas forcément envie de voir et David court aussi,et la plupart de nos amis. 
 
C'est New York qui veut ça aussi, la ville toujours en mouvement qui nous stimule et nous harasse. Mais arrive parfois, sans raison apparente, un déclic qui nous fait ralentir, impulse en nous l'envie de nous poser et de regarder par la fenêtre, de rester plus longtemps que d'habitude dans un café qu'on aime, surtout quand il y a peu de monde, retourner voir pour la quatrième fois un film aimé, lire avec un doux fond musical et faire la sieste comme en été. Sauf que le froid est glacial et qu'on ne peut traîner dans les rues en rêvassant...
 
Du raki au bord de l'eau dans une petite île grecque méconnue, c'est pas pour le moment. Alors, pendant mes quelques jours de latence, vacance, avec un bol de céréales ou un thé chaud, je trie mes photos, celles que nous faisons, mais aussi celles récoltées sur le net. D'où l'idée de ce petit album de beaux gosses, sans ordre précis, juste pour la beauté de l'image et de celui qui a été immortalisé et s'offre à nous comme en hommage aux dieux.







 

 



08 décembre 2024

Le sommeil du juste et de l'heureux...

 
C'est bientôt l'hiver. Comme les ours et les marmottes, l'humain sent l'impérieux besoin de ralentir la machine et de dormir. Les jours sont courts, le soir est vite là, tout s'assombrit soudain et la nuit vient. Cela m'a donné l'idée d'une galerie de portraits de garçons et de jeunes hommes dormant. Chut, pas de bruit ! Respectons leur sommeil. Mais rien n'empêche de rendre hommage à la beauté d'un corps apaisé, dans les bras de Morphée.

 
"Je retrouve une tête inclinée sous une chevelure nocturne, des yeux que l’allongement des paupières faisait paraître obliques, un jeune visage large et comme couché". C'est ainsi que ma chère biographe traduisit l'image que du haut de mes quarante ans passés, moi l'empereur au faîte de la gloire et de la puissance, je souhaitais transmettre de mon jeune amant, ce jeune Bithynien pur et innocent de seize ans qui rentra soudain dans ma vie et que j'ai éperdument aimé, avec qui je partageais quatre années merveilleuses, jusqu'à son sacrifice. par amour pour moi. Il n'avait pas encore tout à fait vingt ans. 

J'aimais tant le regarder dans son sommeil. Après la lutte ou la course, après nos combats amoureux, il sombrait soudain dans un sommeil profond. son visage retrouvait toute la fraîcheur de l'enfance, ses lèvres pâlissaient, ses muscles se détendaient. Le plus souvent étendu à plat-ventre, la jambe droite repliée, sa tête tournée vers le coin le plus sombre de la chambre, les bras entourant le coussin sur lequel ses belles boucles s'étalaient. 

 

Il gémissait parfois, comme un jeune chien qui rêve. La fougue de la puberté jaillissait souvent au milieu d'un rêve et quand il se tournait, son sexe soudain dressé semblait attendre, dans son rêve, ma caresse ou un baiser. Tout en lui était attendrissant et toujours beau à contempler. Tout ce qui émanait de lui était propre et pur. L'aimer était une purification, un délice qui me semblait être soudain l'égal aux dieux.

 
A te regarder dormir, cette image à jamais présente dans ma mémoire, tu restes pour moi le visage parfait, ta beauté était un rêve envoyé par les dieux. Oui, c'est cela, tu étais la figure parfaite, créée et offerte au plaisir joyeux des amants par les dieux. C’est ainsi que tu restes pour moi, et que ma poésie te chante quand m'accompagne à la lyre cet esclave aux cheveux clairs qui te pleure encore.
 
 
 
Ce sont mes larmes que le devoir m'interdit de laisser couler devant le peuple qui ne comprendrait guère que l'empereur continue de souffrir de ton sacrifice, ô mon divin, mon bel amour. Lui peut à discrétion se souvenir des doux moments où vous luttiez ensemble au gymnase, aux baisers que tu lui donnais pour te faire pardonner ta victoire à chaque fois, la supériorité de ta force. Il boudait souvent quand il sentait qu'il ne gagnerait pas. 
 
 
Je voyais bien tes efforts pour le laisser te dépasser et gagner à son tour. Antinoüs, ton cœur était immensément rempli d'amour. Sa victoire à la course, la dernière avant que le Nil ne t'accueille et te ravisse à moi. Tu avais ralenti en me regardant, tes yeux pétillaient à l'idée de la joie que tu lui ferait. Les lauriers qui t'étaient destinés, tu les as toi-même déposé sur sa belle chevelure. quelques heures plus tard, je t'ai vu déposer ton trophée sur son catafalque. J'ai ordonnée que la couronne qui comptait tant pour lui soit mise dans son sarcophage.


Cette image d'un garçon qui dort sur une plage me rappelle ce texte de Cavafy, "Sur la jetée", qui date de 1920  (Στην Προκυμαία pour faire savant sans prétention ni arrogance aucune !) : "Nuit enivrante, obscurité sur la jetée. Puis, dans la petite chambre de l’hôtel de passe — où nous nous sommes pleinement livrés à notre passion maladive ; pendant toutes ces heures, livrés à notre amour, jusqu’au moment où le jour nouveau éclaira les vitres."

 
 
 

24 novembre 2024

Sans amour...par Alphée de Mytilène

 
Malheureux ceux qui vivent sans amour : 
Toute occupation, 
Tout propos sont pénibles. 
Quand de la passion 
Vous n'êtes plus la cible. 
Quant à moi, je traîne mes jours... 
Mais que je vois celui que je vénère :
 J'irai vers lui plus vite que l'éclair. 
Aussi, ne fuyez pas le merveilleux amour : 
À la face du monde je proclame : 
Le dieu Éros est l'aiguillon de l'âme. 
  
 
Alphée de Mytilène qui vécut du temps d'Auguste, premier empereur, a laissé de nombreux épigrammes dont un certain nombre à connotations ouvertement érotiques et pédérastiques (Ce n'était pas un mot injurieux ni un concept honni chez nos aïeux). Peu de ses compositions sont arrivées jusqu'à nous. Hadrien possédait toute l’œuvre du poète dans sa bibliothèque.

23 novembre 2024

Album d'images pour jeune homme gourmand

 Pour Maximilien, étudiant franco-allemand à New York, 
en remerciement de ses longs mails et de nos précieux échanges.
 
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Voilà de quoi affronter l'hiver qui pointe sacrément son nez avec la triste perspective d'un président dont nous ne voulions pas et qui, sauf miracle, sera dès le début de l'année prochaine, aux commandes, les tensions dans le monde, l'ultra libéralisme et la folie furieuse qui semble s'être emparée de la planète entière, ou du moins de ses dirigeants, tous de moins en moins recommandables. Wokisme par ci, antisémitisme par là, fake-news, violence et haine... Sommes-nous vraiment aussi mal partis ? Est-ce la fin des démocraties et l'arrivée du diable ? 
 
 
 
On aurait tendance à y croire et à déprimer. C'est en tout cas le règne des imbéciles, des abrutis, des escrocs, du mensonge et de la violence extrême. Mais ne lâchons rien. Restons joyeux et confiants, gardons comme horizon l'amour et l'amitié, regardons ce qui est beau et oublions toute laideur. Vivons, aimons.
 

Alors, puisque cela ne peut pas nous être enlevé, continuons d'aimer et de contempler la beauté de ces corps qui se montrent dans la simplicité, vivons et restons libres et fiers des valeurs qui nous ont été enseignées.

 
Que cet album nous réchauffe l'âme et l'esprit !







 


Lecteurs amis ou inconnus, n'hésitez-pas à laisser vos commentaires et dire lesquels de ces messieurs ont votre préférence. On ne gagne rien sinon mes cordiales salutations depuis NYC !