Hadrien un jour de juillet contemplait Antinoüs endormi. Il songeait à Pindare, aux vers sur endymion assoupi. Le garçon était d'une telle beauté abandonné au sommeil, le corps soulevé doucement par sa respiration. Et si demain ce coeur si vaillant devait s'arrêter avant le mien ? se demanda l'empereur en caressant la poitrine du bel ami endormi. "Comment pourrais-je lui survivre ?" Que fit Alexandre après le départ d'Ephestion ? Achille sans Patrocle ?". Il s'éloigna de la couche de son amant pour regarder la nuit égyptienne. Alexandrie brillait de milliers de feux, la cité mirifique ne dormait jamais. Il regardait au loin les faisceaux du phare merveilleux et soupira.
Il eut à ce moment précis la certitude que quelque chose de terrible allait arriver. Il eut la vision de ce corps adoré laissé aux mains des apothicaires et des embaumeurs, les pleureuses et le peuple curieux et froid qui contemplait son malheur et ses larmes.
Il eut à ce moment précis la certitude que quelque chose de terrible allait arriver. Il eut la vision de ce corps adoré laissé aux mains des apothicaires et des embaumeurs, les pleureuses et le peuple curieux et froid qui contemplait son malheur et ses larmes.
L'adolescent se retourna, ce dos admirable, la douce courbure de ses reins, ses épaules larges et fortes et ce cou si fin, cette nuque gracile où couraient de belles boucles claires. Hadrien, le maître du monde civilisé, le lettré, le fort, le grand, tremblait comme une fillette en songeant à la séparation. Il ne pouvait plus désormais concevoir sa vie sans son ami, son fils, son amant, son dieu...